For The Beauty Of Wynona 

Daniel Lanois est entre autre collaborateur de Brian Eno, Peter Gabriel, U2 et Robbie Robertson (ex-The Band). À l’écoute de For The Beauty Of Wynona, vous trouverez des lieux communs aux albums de ces artistes auxquels Lanois a participé. Spécialiste des ambiances et des « couleurs » musicales, Lanois a déjà commis Acadie en 1989 et participé à l’élaboration de bandes originales de films dont Sling Blade et The Million Dollar Hotel.

For The Beauty Of Wynona est un disque à la limite expérimental, sans devenir inaccessible. Malgré la présence de musiciens accomplis (Daryl Johnson – basse, Ronald Jones – batterie, Bill Dillon – guitare, Malcolm Burn – clavier et guitare), la technique s’efface pour laisser place à la musique et aux émotions.

The Messenger ouvre ce merveilleux disque. On sait immédiatement quel ton aura l’album. Rythme lent, ambiances éthérées et envoûtantes. Brother L.A. enchaîne avec ses guitares acérées, à la limite du psychédélisme et Lanois démontre sur Still Learning How To Crawl qu’en dépit d’une voix limitée, il est en mesure de transmettre efficacement ses émotions. Beatrice, sur un rythme hypnotique livre à partir de 3 min. 5 sec. un anti-solo de guitare qui mène à Waiting, une anti-chanson garnie d’une ligne de trompette en sourdine qui donne une âme à cette interlude. Cosmique.

The Collection Of Marie-Claire est un clin d’œil à Acadie, son disque précédent. Lanois y chante en alternant le français et l’anglais une complainte amoureuse pigeant aux influences folkloriques du Canada-français. La pièce s’éteint sur une musique vaporeuse avec en bruit de fond, un train au loin qui introduit Death Of A Train sur laquelle Lanois de sa voix rauque nous offre un voyage nocturne qui se termine au son d’une guitare triste et intense.

The Unbreakable Chain entreprend la deuxième partie de l’album avec simplicité et efficacité. Les guitares ne font que colorer le duo voix-basse. Cette basse est de nouveau l’ossature sur Lotta Love To Give, un peu plus rock avec ses guitares à la sauce psychédélique. Guitares quasi absentes dans la première partie de Indian Red, rythmée par une batterie obsédante et une basse « fuzzée » au-dessus desquelles planent, fantômatiques, les chants des esclaves du coton et de la canne.

Les racines musicales de Lanois sont très présentes sur Sleeping In The Devil’s Bed, empruntant à la fois au folk et au country, voir même au zydeco.

For The Beauty Of Wynona fait la synthèse du disque en une seule pièce. Le duo rythmique lent et retenu, soutient les guitares éthérées qui laissent place au chant de Lanois durant les trois premières minutes. Planant.

Tout est clos par Rocky World. Lanois y chante accompagné d’une guitare acoustique et de quelques notes de basse. Douce mélancolie.

Sans copier ses illustres amis (Eno, Gabriel, U2, Robertson, Dylan, Neville Bros), Lanois démontre avec For The Beauty Of Wynona qu’il a bel et bien inscrit sa signature sur chacun des disques qu’il a produit. De plus, évitant « LA » recette pour atteindre une gloire éphémère, Daniel Lanois a choisi la discrétion et l’authenticité. Pour certains, cette démarche demeure sans saveur et sans intérêt. Pour d’autres, dont moi, il s’agit d’une œuvre intemporelle, presque mystique.

Votre note : ???

La mienne : 10 / 10 

Par Denis, Mai 2001.

 

Année : 1993

Note moyenne : 7,5/10